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la baule+ 12 | Avril 2024 Société ► Comprendre la différence entre l’immigration économique et l’asile politique Najat Vallaud-Belkacem : « L’asile peut concerner tout le monde. » Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre, est présidente de France Terre d’Asile et directrice de l’ONG One. Elle est également présidente du groupe Socialiste, Ecologiste et Démocrate au Conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes. Elle est venue dans le studio de Kernews pour expliquer la différence entre l’immigration économique et l’asile politique. La Baule+ : Pouvez-vous nous présenter France Terre d’Asile ? Najat Vallaud-Belkacem : France Terre d’Asile est une structure associative qui date de plus de cinquante ans, avec 1300 salariés, qui accompagne et héberge les demandeurs d’asile. L’objectif est d’agir pour que les personnes persécutées dans leur pays, et qui arrivent chez nous, puissent trouver les meilleures conditions d’intégration dans notre société, quand elles ont été acceptées comme réfugiées. Quelle est la définition de l’asile politique ? C’est lorsque l’on se retrouve dans une situation où l’on a été contraint et forcé de quitter son propre pays suite à une persécution pour une raison politique, religieuse ou de genre. On est persécuté du fait de ce que l’on est et l’on quitte son pays pour espérer trouver l’asile ailleurs. Par exemple, prenons la situation de l’Afghanistan : vous avez des femmes qui sont en danger de mort quotidien, en plus d’être contraintes de vivre sous cage. Donc, le jour où elles quittent leur pays pour espérer trouver un meilleur sort ailleurs, elles sont demandeuses d’asile. L’un des problèmes du droit d’asile, c’est précisément qu’il est utilisé par des gens qui relèveraient notamment de l’immigration économique Cela n’a donc rien à voir avec l’immigration à caractère économique ? Non. Il est important de réussir à distinguer les deux, même si l’on sait aujourd’hui que l’un des problèmes du droit d’asile, c’est précisément qu’il est utilisé par des gens qui relèveraient notamment d’autre chose, notamment de l’immigration économique. C’est utilisé parce que les gens qui relèveraient de l’immigration économique voient que c’est quelque chose de complètement fermé et qu’il n’y a aucune perspective d’être accepté. Donc, ils essayent de passer comme demandeurs d’asile. Ce n’est une bonne chose pour personne. D’abord, ce sont des gens qui vont prendre des risques considérables pour leur propre vie. Vous avez des jeunes gens qui vont quitter le Sénégal ou la Côte d’Ivoire, sans être persécutés, simplement parce qu’ils aspirent à une meilleure vie économique. Ils vont parcourir à pied des milliers de kilomètres, en traversant le désert de Libye. Ils vont se retrouver piégés par des milices libyennes qui sont atroces, entre la torture et l’esclavage. Et ils finissent par arriver dans un état lamentable en Europe. C’est terrible, ils ont emprunté ce parcours en espérant avoir une meilleure vie. Donc, ce n’est pas une bonne chose que de s’imaginer que le canal de l’asile est le bon. On pouvait penser que cette question serait réglée après la chute de l’empire soviétique. Or, on s’aperçoit que les situations sont tendues un peu partout dans le monde. Observez-vous une augmentation du nombre des pays susceptibles de susciter des demandes d’asile ? Malheureusement, oui. Il y a une multiplication des conflits. La couverture médiatique des conflits mondiaux porte sur ceux qui sont à nos portes, comme la guerre en Ukraine, mais beaucoup plus rarement sur ce qui se passe au Soudan, en Éthiopie ou en Érythrée. On pourrait multiplier les exemples de conflits qui ne laissent pas de choix à des populations qui cherchent juste à prendre les routes de l’exil. La plupart du temps, ils vont dans des pays

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